03/11/2014

Projet de port pétrolier à Cacouna: un danger pour les bélugas

Au large de Cacouna, dans une aire comprise dans l’habitat essentiel du béluga, TransCanada projette d’établir un port pétrolier. Depuis le printemps 2014, l’entreprise a procédé à des activités sismiques et des forages pour caractériser les lieux et préciser son projet qui inclut une jetée de plus de 700 m de long. Ces travaux posent des risques sérieux pour le béluga, selon l’avis de spécialistes indépendants, y compris Robert Michaud du GREMM. Pêches et Océans Canada a autorisé les travaux de forage sans demander un avis scientifique à ses spécialistes mammifères marins. Un jugement de la Cour supérieure a suspendu l’autorisation émise par le ministère du Développement durable, de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques jusqu’au 15 octobre, critiquant sévèrement le ministre et soulevant la question de l’ingérence politique dans le processus d’autorisation. Le dossier suscite une importante mobilisation populaire.

30 octobre 2014: TransCanada dépose son projet Oléoduc Énergie Est à l’Office national de l’énergie — Cacouna toujours prévu comme port pétrolier

Pour en savoir plus

Index de la page

Points de vue

Le dossier en sept points

    • Au large de Cacouna, dans une aire comprise dans l’habitat essentiel du béluga, TransCanada a procédé en avril 2014 à des activités géophysiques (sondages sismiques par ondes sonores) et a obtenu l’autorisation de Pêches et Océans Canada d’effectuer dès le printemps 2014 des activités géotechniques (forage).
    • TransCanada a procédé aux activités géophysiques dans le cadre d’un avis scientifique de Pêches et Océans Canada, qui a jugé que les travaux présentaient des risques majeurs pour les bélugas et a imposé des limites et conditions, dont celle d’arrêter les activités le 30 avril.
    • Pour la seconde phase de ces travaux d’acquisition d’information sur la nature des fonds marins, qui nécessiteront des forages au coeur de l’habitat des bélugas et occasionneront un bruit important, Pêches et Océans Canada a délivré une autorisation sans soumettre le projet à ses propres scientifiques pour qu’ils évaluent les risques. Selon des experts indépendants, étant donné l’évaluation des risques contenue dans l’avis scientifique de Pêches et Océans Canada pour les activités géophysiques, les scientifiques ne pourraient que conclure que les activités de forage ne peuvent être autorisées pendant la période où les femelles et les jeunes fréquentent le secteur, soit du printemps à l’automne.
    • Le secteur de Cacouna est considéré comme une pouponnière pour le béluga du Saint-Laurent, qui connaît ces dernières années un déclin inexpliqué. Le secteur de Cacouna est compris dans l’habitat essentiel du béluga du Saint-Laurent, identifié par l’équipe de rétablissement tel que prévu par la Loi sur les espèces en péril (LEP). L’habitat essentiel est l’habitat minimum nécessaire pour assurer le rétablissement d’une espèce en péril.

  • Le projet de port pétrolier (point rouge) est situé dans une aire de haute résidence (zone grisée) des bélugas du Saint-Laurent, comprise dans l’habitat essentiel de cette espèce en péril. (Cliquez sur la carte pour l’agrandir.)

 

  • Les bruits élevés dans l’habitat essentiel du béluga soulèvent plusieurs préoccupations: le bruit puissant amène le béluga à éviter l’habitat, qui ne peut alors remplir ses fonctions essentielles; l’accès à la nourriture et aux habitats de qualité est primordial pour permettre aux femelles de compléter avec succès leur gestation et de prendre soin de leur nouveau-né; le bruit pourrait aussi affecter les poissons, sources de nourriture des bélugas. Ces préoccupations sont particulièrement vives dans le contexte de la fragilité actuelle de la population, qui a connu récemment trois années de mortalités inhabituelles de nouveau-nés et dont les femelles, depuis quelques années, meurent plus souvent au moment de donner naissance.
  • Trois experts indépendants ont demandé en mai à TransCanada et Pêches et Océans Canada d’annuler toutes les activités prévues dans la zone de Cacouna. Le Comité de coordination du parc marin du Saguenay-Saint-Laurent a également fait connaître ses vives préoccupations, et une société scientifique internationale a exprimé ses craintes aux premiers ministres Harper et Couillard. Plusieurs mobilisations citoyennes ont également eu lieu, et des municipalités qui dépendent de l’estuaire du Saint-Laurent pour leur économie ont signé des résolutions exprimant leurs inquiétudes ou leur opposition au projet de TransCanada.
  • Un regroupement d’organismes environnementaux s’est adressé aux tribunaux en mai 2014 pour mettre un frein aux travaux de forage. TransCanada s’était alors engagée à suspendre ses travaux jusqu’à l’obtention des autorisations du gouvernement du Québec. L’autorisation a été délivrée par le ministère du Développement durable, de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques (MDDELCC) le 21 août suivant. Les groupes environnementaux soutiennent que le gouvernement du Québec a fait preuve de complaisance en se contentant de recevoir des informations incomplètes de Pêches et Océans Canada qui n’a toujours pas produit d’avis scientifique et dont les experts demeurent silencieux depuis avril dernier. La Cour supérieure a donné raison aux requérants dans un jugement le 23 septembre, et a ordonné la suspension des travaux jusqu’au 15 octobre.

 

Pour comprendre les inquiétudes des experts:

Mises en contexte ou prises de position

Archives

16 octobre 2014: TransCanada a dépassé les niveaux de bruit lors des forages de l’automne; le Ministère de l’Environnement demande un nouveau plan de travail

 

Avant d’autoriser la reprise des travaux, le MDDELCC demande à TransCanada de modifier son plan de travail pour réduire les niveaux de bruit auxquels l’entreprise expose les bélugas lors des forages. Même si la période de haute fréquentation est terminée, il y a encore des bélugas dans le secteur visé par ces activités. Lors des forages effectués avant la suspension de l’autorisation du ministère par la Cour supérieure, le bruit a largement dépassé la norme prévue dans le certificat d’autorisation délivré par le gouvernement provincial à au moins deux reprises. Cette forme de pollution est préoccupante car le bruit peut tenir les bélugas à l’écart d’un secteur essentiel pour les mères et leurs jeunes. La population des bélugas du Saint-Laurent est en déclin, et son statut pourrait bientôt passer de “menacé” à “en voie de disparition”, une situation plus critique.

29 septembre 2014: les bélugas à Tout le monde en parle

 

Le chercheur Pierre Béland et l’humoriste océanographe Boucar Diouf étaient à Tout le monde en parle le 28 septembre pour discuter des enjeux soulevés par le projet de port pétrolier à Cacouna par TransCanada. Un jugement de la Cour supérieure ordonnait le 23 septembre la suspension des travaux de forage jusqu’au 15 octobre.

Pour voir l’émission du 28 septembre: Rendez-vous sur la page de l’émission et sélectionnez le segment de l’émission avec Pierre Béland et Boucar Diouf.

Autre nouvelle: l’organisation Nature Québec lance une pétition web pour inviter les citoyens à interpeler le Premier ministre Couillard, afin qu’il interdise définitivement tout travaux dans l’habitat essentiel du béluga du Saint-Laurent, au large de Cacouna.

23 septembre 2014: la Cour supérieure ordonne l’arrêt des travaux à Cacouna

 

Les groupes environnementaux revenaient les 17 et 18 septembre dernier devant la Cour supérieure afin de demander l’arrêt des travaux de forage qui ont lieu devant Cacouna, dans l’habitat essentiel du béluga du Saint-Laurent. La juge Claudine Roy a rendu sa décision le 23 septembre; elle suspend « l’effet du certificat d’autorisation » délivré par Québec à TransCanada et ordonne l’arrêt des travaux de forage jusqu’au 15 octobre.

Plus de détails dans les articles suivants:

18 septembre 2014: les groupes environnementaux de nouveau devant la cour: les meilleures expertises auraient été écartées

 

Les groupes environnementaux revenaient les 17 et 18 septembre devant la Cour supérieure afin, encore, de demander l’arrêt des travaux de forage qui ont lieu devant Cacouna, dans l’habitat essentiel du béluga du Saint-Laurent.

Nouvelle tirée des articles suivants:

13 septembre 2014: Une rencontre d’urgence aura lieu à Ottawa

 

Le Nouveau Parti démocratique (NPD) a réussi à forcer la tenue, la semaine prochaine, d’une rencontre d’urgence du comité parlementaire des pêches au sujet des forages exploratoires au large de Cacouna. Cette rencontre vise à faire témoigner des spécialistes qui ont donné le feu vert pour les forages qui doivent permettre à TransCanada de déterminer l’emplacement du possible port pétrolier dans le cadre du projet d’oléoduc Énergie Est.

Nouvelle tirée des articles suivants:

2 septembre 2014: La Cour supérieure rejette la demande d’injonction des groupes environnementaux

 

La Cour supérieure a rejeté la demande d’injonction des groupes environnementaux dans une décision rendue le 1er septembre. Si l’issue est défavorable pour les requérants, ceux-ci s’estiment satisfaits que la procédure judiciaire ait permis de mettre en lumière le fait que le certificat d’autorisation délivré par Québec ne s’appuie sur aucun avis scientifique en bonne et due forme. Aux yeux des requérants, la preuve présentée en Cour démontre de manière évidente que le gouvernement du Québec a fait preuve de complaisance en se contentant de recevoir des informations incomplètes de Pêches et Océans Canada qui n’a toujours pas produit d’avis scientifique et dont les experts demeurent silencieux depuis avril dernier. Selon les groupes, en agissant comme il l’a fait, Québec se fait complice du musellement des scientifiques fédéraux qui travaillent à la protection des bélugas du Saint-Laurent.

Dans les médias

23 août 2014: Les travaux géotechniques vont de l’avant

 

L’autorisation a été délivrée par le ministère du Développement durable, de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques (MDDELCC). Pour lire le communiqué de presse : Les bélugas sous haute surveillance lors des sondages géotechniques à Cacouna – TransCanada Pipelines devra se soumettre à des conditions sévères pendant les travaux

Dans les médias

17 juin 2014: Une société scientifique internationale exprime ses craintes au premier ministre Harper

 

La Society for Marine Mammalogy (SMM) est le plus grand regroupement professionnel du monde voué à l’étude des mammifères marins, avec environ 2000 membres provenant de 60 pays. Le 17 juin, la présidente de la SMM, le Dr Helene Marsh, alertée par WWF Canada, signait une lettre adressée au premier ministre Stephen Harper. Elle y présentait les grandes préoccupations que le projet de port pétrolier à Cacouna soulève pour le rétablissement et la survie des bélugas du Saint-Laurent.

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10 juin 2014: Le Comité de coordination du Parc marin du Saguenay–Saint-Laurent: vivement préoccupé par le projet de port pétrolier à Cacouna

 

Cette instance est l’entité de gestion participative du parc marin, formée de représentants des régions limitrophes et provenant de divers secteurs d’activités. Le Comité a rédigé un avis qu’il a fait parvenir aux gouvernements fédéral et provincial, via les ministères concernés. Un communiqué de presse diffusé le 10 juin synthétisait les préoccupations quant aux enjeux environnementaux et socio-économiques soulevés par le projet de TransCanada. En voici un extrait:
« La construction et la mise en service d’un port pétrolier dans un milieu aussi fragile qu’essentiel pour la survie de plusieurs espèces, dont le béluga du Saint-Laurent, sont très inquiétants. « Ça implique de multiples nouveaux risques, non seulement pour les bélugas, mais pour l’ensemble du secteur maritime de l’estuaire du Saint-Laurent, les îles et le parc marin lui-même. » explique le président du comité, M. Émilien Pelletier.

Bien que le dérangement des mammifères marins soit au coeur des préoccupations du comité et des populations riveraines, le déversement des eaux de ballast et les accidents d’hydrocarbures, notamment en hiver, présentent des risques importants, moins connus, mais bien réels selon le comité. »

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16 et 23 mai 2014: Des organismes environnementaux s’adressent aux tribunaux pour assurer la protection des bélugas à Cacouna

 

Le Centre québécois du droit de l’environnement (CQDE), la Fondation David Suzuki, Nature Québec, la Société pour la Nature et les Parcs du Canada (SNAP) et la citoyenne France Dionne ont déposé le 16 mai une requête à la Cour supérieure du Québec pour mettre un frein aux travaux de forage prévus dans les prochains jours par l’entreprise TransCanada en plein cœur d’une pouponnière pour le béluga du Saint-Laurent, à Cacouna.

Le 23 mai, TransCanada s’est engagée devant la Cour supérieure du Québec à suspendre ses travaux de forages prévus dans les prochains jours, tant qu’elle n’aura pas obtenu de Québec les autorisations nécessaires. Alors qu’avant le dépôt de l’injonction, la compagnie annonçait qu’elle débuterait incessamment ses travaux de forage, elle a fait volte face la veille du procès et déposé des demandes d’autorisation auprès de Québec en vertu de la Loi sur la qualité de l’environnement et de la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune.

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24 avril 2014: Demande de trois experts bélugas à TransCanada et Pêches et Océans Canada : annulation des activités géophysiques et géotechniques à Cacouna

Très inquiets des activités géophysiques et géotechniques que TransCanada est sur le point d’entreprendre au cours des prochains jours, au printemps et à l’été dans le secteur de Cacouna, trois scientifiques impliqués dans des programmes à long terme sur le béluga du Saint-Laurent interpellent TransCanada et Pêches et Océans Canada.

«Nous estimons que les risques associés [à ces activités] sont réels et majeurs, et qu’ils ne peuvent être ramenés à des niveaux acceptables dans la perspective où ces activités sont évaluées à la pièce, sans tenir compte des impacts cumulatifs sur la population des bélugas, écrivent-ils.»

Le béluga du Saint-Laurent est une espèce menacée, protégée par la Loi sur les espèces en péril (LEP), la population est en déclin, et des démarches sont en cours pour élever son statut à une catégorie de plus haut risque de disparition. De plus, le site visé par le projet de port pétrolier à Cacouna est au cœur de son habitat essentiel.

«Il nous apparaît irresponsable et peut-être illégal de soumettre ainsi une population protégée par la LEP à un tel niveau de risque, sans que le projet ait été préalablement évalué dans son ensemble.»

Les trois scientifiques demandent à TransCanada de suspendre immédiatement les sondages géophysiques. Ils demandent aussi à Pêches et Océans Canada de ne pas autoriser les activités géotechniques (forage) prévues en mai/juin par TransCanada.

Les travaux des auteurs de ces demandes s’étendent sur plus de 30 ans, et ont contribué à mieux comprendre cette population, à documenter son statut et à identifier les facteurs limitant son rétablissement. Leurs préoccupations s’appuient sur leur compréhension des activités géophysiques et géotechniques présentées par TransCanada, sur leur connaissance de la population de bélugas du Saint-Laurent et sur la vaste littérature scientifique établissant les risques indéniables pour les mammifères marins associés au type d’activités prévues ce printemps et cet été par TransCanada aux abords de Cacouna.

Les signataires de la lettre sont :

  • Robert Michaud, M. Sc.Président et directeur scientifiqueGroupe de recherche et d’éducation sur les mammifères marins (GREMM)
  • Pierre Béland, Ph. D.PrésidentInstitut national d’écotoxicologie du Saint-Laurent (INESL)
  • Stéphane Lair, D.M.V., D.V.Sc., Diplomate, American College of Zoological MedicineProfesseur titulaire
Directeur du Centre québécois sur la santé des animaux sauvages
Faculté de médecine vétérinaire 
Université de Montréal

Les lettres sont disponibles pour téléchargement :

Suivi dans les médias du 18 avril au 2 juin 2014

 

28 novembre 2013

 

Alors qu’on apprenait récemment que la population de bélugas du Saint-Laurent est en déclin depuis une dizaine d’années, et que des taux de mortalités élevés touchent chroniquement les nouveau-nés et les femelles pendant la période de mise bas, TransCanada annonce son intention de construire un port pétrolier à Cacouna. Le projet est en lien avec celui de l’oléoduc qui transporterait le pétrole de l’Alberta vers le Québec. Les scientifiques s’inquiètent car le secteur est une pouponnière pour les bélugas. Il est à proximité du parc marin du Saguenay-Saint-Laurent et dans une aire comprise dans le projet de Zone de protection marine de l’Estuaire. Or, le dérangement lié au bruit et au passage de navires est particulièrement préoccupant dans les secteurs fréquentés par les femelles et les jeunes. Il peut compromettre la mise bas ou séparer les mères des jeunes, qui sont dépendants de ce lien pendant environ deux ans.

Dans les médias: