12/07/2015
Avec les bélugas: semaine du 6 juillet
BIOPSIES ET ADOS ACTIFS
Notre deuxième semaine de terrain pour le projet d’étude comportementale des bélugas s’est étalée sur trois jours non consécutifs soit le 6, 9 et 10 juillet, pour un total de 20 h en mer et 11 h d’observation de béluga. La météo était plus à notre avantage: faible couverture nuageuse, brise légère, peu de pluie. Bref, une bonne visibilité et une mer d’huile, c.-à-d. sans vagues.
Nous avons d’abord sillonné les secteurs en amont, sur la rive sud de l’estuaire du Saint-Laurent, au large de l’île aux Pommes à la hauteur de Trois-Pistoles et au large de Kamouraska. Nous y avons rencontré plusieurs femelles accompagnées de juvéniles ainsi que des groupes d’«adolescents», avec un fort pourcentage de «gris» et de veaux, les nouveau-nés.
En aval, nous avons navigué au large de la pointe Sauvage, à la hauteur des Bergeronnes. Nous avons observé des groupes d’adultes et des groupes de «blancs sales», c.-à-d. de jeunes adultes, présumés mâles dans ce cas-ci. Dans la plupart des observations, les troupeaux demeuraient sur place, très dynamiques. Ils plongeaient et remontaient au même endroit à plusieurs reprises; un comportement qu’on appelle le «miling». Aussi, nous avons eu la chance d’entendre leurs vocalises et de les voir cracher de l’eau. Ce comportement de cracher peut s’expliquer par leur alimentation de type «suçeur». Quand ils aspirent leur proie en surface, l’eau est recrachée à l’extérieur. Cela pourrait aussi leur servir à effrayer leurs proies. Les bélugas sont des animaux grégaires et très sociaux. Ils communiquent entre eux avec différents sons et différentes fréquences, certaines perceptibles à l’oreille humaine. Finalement, au cours des trois sorties, un total de 6 troupeaux de 15 à 60 bélugas ont été observés, des groupes de phoques gris et de phoques communs, des petits rorquals, des marsouins et des eiders à duvet, un oiseau marin commun de la région.
Au cours de la semaine, nous avons eu un invité à bord. Antoine Simond effectue un projet de recherche dans le cadre de son doctorat avec le Mériscope. Il a récolté des échantillons de tissus (biopsies) afin de les analyser pour une étude sur les contaminants émergents (les retardateurs de flammes) et leurs effets sur le petit rorqual et le béluga.
Lundi 6 juillet, 9 h 25: Au large de Trois-Pistoles, nous avons fait un premier contact avec un troupeau de mâles et de femelles typiquement «adolescent» d’environ 60 individus «gris». Pendant l’été, il se forme une ségrégation entre les mâles et les femelles adultes. Les secteurs en amont sont fréquentés principalement par des groupes de femelles, et les secteurs en aval par des troupeaux de mâles. Le secteur du Saguenay est fréquenté par les deux sexes et on y observe parfois des troupeaux mixtes. Les mâles forment des réseaux stables d’année en année, alors que les femelles forment des coalitions plutôt temporaires pour la saison. Ce troupeau mixte de jeunes semblait ne pas avoir encore choisi un secteur particulier.
Jeudi 9 juillet, 13 h: au large de Cacouna, nous observons une femelle avec un comportement particulier. Nous l’approchons et constatons que cette femelle maintient son veau, mort, à la surface de l’eau. Nous avions déjà observé ce comportement particulier et mystérieux chez les bélugas du Saint-Laurent, mais la fonction demeure inconnue. Grâce à notre hydrophone, nous avons enregistré les vocalises de la femelle.
Vendredi 10 juillet: une journée fructueuse pour les biopsies, des échantillons de peau qui nous permettent entre autres de connaître le sexe de l’animal et ses liens parentaux. Cette technique, s’effectuant à l’aide d’une arbalète, nécessite beaucoup d’agilité, car il faut viser une cible qui précise en mouvement dans des conditions de navigation parfois houleuses. Avec la pratique, nous obtenons un taux de succès de 80 %, mais comme l’occasion d’échantillonner n’est pas fréquente, chaque biopsie est précieuse.
En rafale, voici les vedettes qui ont été observées cette semaine: Douxi, Bonheur et DL0281.
Le Bleuvet est un bateau du GREMM. Il est dédié au programme de recherche à long terme sur les bélugas du Saint-Laurent.